De plus en plus de projets d’investissements directs étrangers, notamment dans le secteur bancaire et financier, sont ajournés ou différés en République Démocratique du Congo depuis quelques mois.
Deux raisons majeures peuvent être mises en avant pour expliquer cet attentisme :
D’une part, les incertitudes qui pèsent sur la prochaine élection présidentielle, prévue en novembre 2016, calment les ardeurs de beaucoup d’acteurs de la finance internationale.
Outre le fait que le respect du calendrier électoral, établi par la commission nationale indépendante est régulièrement sujet à caution (pas moins de sept élections sont prévues sur un horizon d’un an…), c’est aussi la liste des prochains postulants qui, à 18 mois de cette échéance majeure pour le pays, reste encore méconnue et soulève donc beaucoup d’interrogations.
En particulier Joseph Kabila, le président actuel, figurera-t–il sur la liste des prochains prétendants à la magistrature suprême, en dépit d’une constitution de février 2006 qui lui interdit de briguer un troisième mandat consécutif ?
La question, sur toutes les lèvres à Kinshasa, demeure à ce jour sans réponse…
Par ailleurs, force est de constater que l’image que renvoie le pays en dehors de ses frontières, reste particulièrement altérée du fait :
– d’une carence en termes d’infrastructures publiques (moins de 5% des routes en RDC sont asphaltées, 9% de la population est raccordée à l’électricité…).
-d’une instabilité, qui s’estompe quelque peu, mais reste encore très présente en particulier dans la région du Kivu, à l’est du pays, et au nord du Katanga (près de 20% du territoire congolais seraient encore contrôlés par des groupes armés selon l’ONU).
– d’un climat des affaires qui demeure, selon la banque mondiale, totalement délétère (la RD Congo arrive en 183ème position au classement « doing business » de 2014).
Pourtant, des signaux très positifs, trop souvent négligés ou minorés par certains décideurs, ont été envoyés récemment par l’économie congolaise, et devraient inciter les groupes bancaires internationaux à investir massivement, et surtout dès à présent, dans un pays où le potentiel de développement est colossal, puisque 95% de la population n’est pas bancarisée et moins de 5% des deux millions et demi de micros, petites et moyennes entreprises (qui constituent le cœur du tissu économique local) n’ont pas accès aux financements bancaires.
Ainsi, certains évènements, dont l’importance ne peut pas être contestée, devraient encourager les investisseurs potentiels à prendre position, sans attendre, sur un marché congolais où la connaissance rapide du terrain et des spécificités locales restent un facteur clef de succès :
Le sursaut des autorités congolaises
Des mesures importantes ont enfin été mises en place par les autorités locales. Ainsi, la bancarisation de la paie des fonctionnaires, initiée en 2011, a conduit plus de 700 000 agents de l’état à percevoir, aujourd’hui, leurs salaires par voie bancaire, alors que seuls 2 500 d’entre eux percevaient leur rémunération par ce biais avant le démarrage d’un process à mettre incontestablement au crédit du gouvernement du premier ministre Augustin Matata Ponyo.
Par ailleurs, un important projet « d’inter bancarisation » est aujourd’hui piloté par la Banque centrale, avec l’appui et le concours financier de la banque mondiale. Bien entendu, un système monétique de paiement et de retrait par carte existe déjà en RDC, mais il n‘est pas encore interbancaire, et c’est bel et bien cela que l’organe de régulation local se propose de faire évoluer prochainement.
De plus, il convient de saluer les efforts réalisés par l’administration congolaise en termes de politique monétaire, puisque le principal taux directeur de la banque centrale a enregistré une baisse spectaculaire, passant de plus de 20% au début de l’année 2012, à 2% à ce jour.
L’arrivée prochaine du géant kenyan Equity bank
Adepte de la bancarisation de masse (Equity Bank est passé, en l’espace de dix ans, de 500 000 clients à plus de 9 millions), ce leader de la finance kenyane a annoncé très récemment sa prise de participation majoritaire, à hauteur de 79%, dans le capital de Procrédit (7ème banque de RD Congo en termes de total du bilan).
Ayant bâti en Afrique de l’est son succès commercial sur la proximité avec la population, Equity Bank va vraisemblablement « changer la donne » au Congo, en dupliquant un modèle qui s’appuie, notamment, sur l’agency banking, véritable partenariat commercial permettant à tout détenteur de compte de réaliser ses principales opérations bancaires (dépôt et retrait de cash) chez un commerçant de proximité (superette, buraliste, épicier…).
Bien entendu, ce modèle d’organisation permet non seulement aux établissements financiers de minorer les coûts relatifs à la mise en place et à la gestion de réseaux d’agences, toujours très coûteux et très chronophages en Afrique subsaharienne, mais aussi de rapprocher le client de son point d’exploitation, dans des pays ou les densités bancaires sont presque dérisoires (une agence pour 200 000 habitants en RDC à date…).
Enfin, en ayant supprimé les minima de dépôt à l’ouverture de compte et toutes les restrictions liées à la fréquence et au montant des retraits, Equity bank a contribué à révolutionner le retail banking au Kenya et incitera, très probablement, les banques de RDC à faire preuve de davantage de dynamisme, de réactivité et d’ingéniosité en termes de conquête clientèle.
L’essor du secteur des télécommunications
Alors que moins de 300 000 lignes étaient ouvertes dans ce pays à la fin des années 90, le Congo en compte plus de 35 millions aujourd’hui (selon les dernières estimations de l’autorité de régulation des postes et télécommunication).
Avec un taux de pénétration en constante augmentation, la téléphonie mobile en RDC, et sa demi-douzaine d’opérateurs implantés localement, constitue incontestablement une source de développement considérable pour l’ensemble des services et produits financiers.
Ainsi, des partenariats innovants sont d’ores et déjà conclus, entre groupes bancaires et opérateurs locaux, afin de contribuer à l’inclusion financière des populations (à titre d’exemple, Airtel et UBA ont annoncé conjointement, en Mai dernier, le lancement de « libiki » le premier service de micro-crédit par téléphone en République démocratique du Congo).
Enfin, l’explosion de la téléphonie mobile donne aux établissements financiers l’opportunité d’améliorer leur communication opérationnelle, en mettant en place des « centres d’appels » destinés, non seulement à améliorer le service rendu à la clientèle en termes de disponibilité et de pédagogie, mais aussi à proposer des produits adaptés en vue de l’équipement ou de la fidélisation de leurs clients…certains acteurs locaux ont parfaitement intégrés cette dimension en mettant récemment en place l’organisation nécessaire.
Des banques locales qui commencent à innover
Dans un pays où sept congolais sur dix ont moins de 25 ans, il était fondamental que les établissements bancaires accordent une place considérable à l’innovation technologique et commercialisent de nouvelles applications dont la –jeune- population congolaise est de plus en plus friande.
« Pepele mobile », voici un exemple parmi les nouveaux services financiers à distance qui rythment, depuis quelques mois, l’actualité des banques de RD Congo.
Bien évidemment, ces dernières cherchent à « surfer » sur l’essor du secteur des télécommunications local, en proposant à leur clientèle de réaliser l’ensemble de leur opérations courantes (consultation en temps réel de leurs soldes, retrait de cash via les DAB, transferts de fonds nationaux et à l’étranger) à partir de leur simple téléphone portable…
La libéralisation du secteur des assurances
Attendue depuis fort longtemps, la loi relative à la libéralisation du secteur des assurances, votée le 14 Janvier dernier et promulguée par le président de la république il y a quelques semaines, a mis un terme au monopole dont la Sonas (société détenu par l’état) bénéficiait depuis 1967, quant à la distribution des produits d’assurance en RD Congo.
Très concrètement, cette mesure, tant espérée au sein des milieux d’affaires du continent, ne manquera pas d’attirer sur le sol congolais les poids lourds de l’assurance africaine (Sahame, Sunu, Wafa, NSIA etc) dans un pays ou la souscription de contrat reste embryonnaire (moins de 20% des véhicules automobiles, en circulation au Katanga, sont assurés en dépit du caractère obligatoire de cette garantie).
Dès lors, comment ne pas imaginer le fantastique potentiel de synergies et d’opportunités commerciales que ne manquera pas de générer l’essor des activités de bancassurance, ayant contribué à l’augmentation substantielle du taux de bancarisation dans un certain nombre de pays africains (Maroc) ?
En conclusion, tous les acteurs de la finance internationale, qui décideront de franchir le pas congolais dès à présent, bénéficieront d’un avantage concurrentiel incontestable et prendront une position préférentielle dans le deuxième pays le plus vaste du continent et le troisième le plus peuplé d’Afrique subsaharienne, riche d’un marché de consommateurs aux perspectives incomparables et pouvant générer un retour sur investissement impressionnant !
Christian Kazumba pour Info Afrique
Affaire POGAB : Comment les chinois ont pu faire annuler la décision prise en 2011?
Pour comprendre cette affaire, il faut remonter à 2009, voire 2008. Le tribunal de commerce de Lisieux (France) avait décidé en faveur des libanais. Ces derniers avaient simplement sollicité et obtenu la reconnaissance de ce jugement au Gabon, conformément aux articles 34 et 37 de la convention d’entraide judiciaire entre la France et le Gabon datant du 23 juillet 1963 pour faire appliquer l’exéquatur.
Un article paru sur gabonreview intitulé «Entorse à l’éthique au sein de l’appareil judiciaire » fait état d’une tentative de corruption, mieux de corruption carrément orchestrée par la partie libanaise au sein de la justice gabonaise.
Cet article souligne que : Dans la célèbre affaire opposant le franco-libanais Ghassan Bitar et le groupe chinois François Wu & Guohua Zhang qui se déclarent tous les deux propriétaires de l’entreprise Pogab, filiale gabonaise de l’entreprise française de contreplaqué Plysorol, le premier cité vient de prendre avantage sur son adversaire : il s’est fait recevoir par le président de la Cour d’appel de Libreville. «D’importants pots de vins ont été versés et la messe est désormais dite».
A lecture de l’évolution de cette affaire depuis 2009, l’on est en droit de se poser quelques questions dont la plus importante est de savoir : comment les chinois ont pu faire annuler la décision prise en 2011? Entre chinois et libanais qui a intérêt de corrompre qui ?
En se saisissant, de cette affaire, en vue de sauver les emplois de plusieurs gabonais dont près de 200 de la scierie John Bitar qui paient les pots cassés du litige de Pogab à cause du fait qu’ils partagent tous le même cadre de travail, cette structure a dénoncé une mascarade incompréhensible.
En soulignant les raisons pouvant conduire à un chômage technique décrite dans l’article 59 de la Loi 3/94 portant Code du Travail en République gabonaise, le HCANEG s’interroge : «Comment une entreprise dont les employés n’exercent pas car ne pouvant accéder à leurs postes de travail, peut-elle déclarer chômage technique ? Quelle est l’autorité qui en a fait la demande ? Est-elle compétente ? Si non qui a négocié les salaires avec les entreprises quand nous savons que cette société est dans une phase très litigeuse ? Qui joue les marionnettes à la présidence de la République ? Les ramifications vont-elles jusqu’au niveau de l’Ordre Judiciaire ? Qui auto
rise les paiements ? Le procureur de la République est-elle saisie ?», autant de questions sans réponses auxquelles le HCANEG invite les autorités compétentes à répondre.
Dans cet imbroglio, certains employés de la scierie John Bitar, une structure créée et gérée par la partie libanaise, auraient reçus un mois de salaire payés par les chinois avant le propriétaire libanais ne règle les autres mois.
Le HCANEG qui demande à ce que la loi soit appliquée dans toute sa rigueur et sans ingérence ni pressions invite la presse à faire preuve de retenue en laissant la justice faire son travail en toute impartialité.
IA / NN/FM/15