Les chefs d’Etat et de gouvernement et les ministres de l’éducation de plus de 40 pays ont adopté mercredi la Déclaration de Paris : un appel mondial initié par l’UNESCO et par la France pour accroître les investissements dans l’éducation au lendemain de la crise du COVID-19.
Paris, 10 novembre – Au cœur de la pandémie, 1,6 milliards d’enfants et d’adolescents se sont retrouvés privés d’école. Parmi eux, 500 millions d’élèves, principalement dans les pays du Sud, sont sans accès à l’enseignement à distance. L’UNESCO s’est rapidement mobilisée en fédérant les Etats, les organisations internationales et les entreprises au sein d’une Coalition mondiale pour l’éducation qui a permis d’assurer la continuité pédagogique dans 112 pays.
Malgré cette mobilisation sans précédent, la situation reste aujourd’hui préoccupante. Selon le dernier décompte de l’UNESCO, les établissements scolaires sont toujours fermés totalement ou partiellement dans 65 pays, affectant 750 millions d’élèves.
Dans les pays où les écoles réouvrent, il existe aussi un motif d’inquiétude : celle qu’une partie des enfants ne retourne pas en classe. C’est en particulier le cas des filles, dont la scolarisation était déjà un acquis fragile dans certains pays à faible revenu. L’UNESCO évalue à 11 millions le nombre de filles à travers le monde qui risquent de ne pas retourner à l’école après la pandémie.
Ces risques sur la scolarisation des enfants s’inscrivent dans un contexte global de sous-investissement dans l’éducation. Les Etats membres de l’UNESCO se sont accordés depuis 2015 sur un financement de l’éducation à hauteur de 4 à 6% du PIB ou de 15 à 20% des dépenses publiques, mais la majorité des pays n’atteignent pas encore ce seuil. Il apparait par ailleurs que seul 1% du montant des plans de relance post COVID-19 est alloué à l’éducation dans les pays à faible revenu et seuls 2,9% dans les pays développés.
Un accord pour relancer les investissements
Mercredi, Audrey Azoulay, Directrice générale de l’UNESCO, et Emmanuel Macron, Président de la République Française, ont co-présidé une réunion rassemblant les chefs d’Etat et les ministres de l’éducation de plus de 40 pays, avec l’objectif de renforcer l’engagement politique mondial et national en faveur de l’éducation.
« La pandémie de COVID-19 est venue marquer pour tous, dans le monde entier, l’importance cruciale de l’éducation comme bien public mondial. Au cœur de la crise, la coalition internationale initiée par l’UNESCO a permis de répondre aux besoins les plus urgents. Nous sommes venus en aide à plus de 400 millions d’élèves et 12 millions d’enseignants dans 112 pays », a expliqué Audrey Azoulay, Directrice générale de l’UNESCO. « Aujourd’hui, alors que l’urgence immédiate de la crise peut sembler passée, notre mobilisation doit néanmoins se poursuivre. Il est impératif de donner la priorité à l’éducation en tant qu’investissement le plus puissant pour notre avenir commun. Si nous n’investissons pas dans l’éducation maintenant, le coût sera beaucoup plus élevé pour les générations à venir », a-t-elle appelé à l’attention des chefs d’Etat et de gouvernement.
« Avec la pandémie, nous avons aussi subi une crise éducative d’une ampleur inédite, qui est venue s’ajouter aux défis de l’accès universel à une éducation de qualité. Au plus fort de la crise, fin mars 2020, ce sont 90% des écoliers et étudiantes du monde qui ont vu leurs écoles fermer, soit plus de 1,6 milliards d’élèves. Ce choc a touché de plein fouet les enfants plus vulnérables, en particulier les filles. En France comme à travers le monde, nous sommes engagés pour faire de l’accès à l’éducation une priorité. Car l’école est le lieu privilégié de construction d’un projet commun et d’un destin partagé pour nos sociétés. L’école, c’est la victoire des Lumières et de la science contre toute forme d’obscurantisme. C’est cette vieille idée, si jeune, portée par celles et ceux qui croient que la raison est présente en chaque enfant et doit être accompagnée », a souligné Emmanuel Macron, Président de la République Française.
Ces échanges ont abouti à l’adoption de la Déclaration de Paris pour l’éducation. Dans ce texte, les Etats participants s’engagent à améliorer les investissements en s’appuyant sur les financements publics et la coopération public-privé. Ils appellent également à renforcer l’aide internationale à l’éducation, en en faisant une priorité en vue d’atteindre l’objectif de 0,7% du PNB des donateurs de l’aide publique au développement.
Un rapport UNESCO pour repenser les Futurs de l’éducation
Le même jour, Audrey Azoulay, Directrice générale de l’UNESCO, et Sahle-Work Zewde, Présidente de l’Ethiopie, ont présenté le nouveau rapport de perspective sur l’éducation. Fruit de deux ans de travail d’une commission internationale indépendante, il est fondé sur les contributions de plus d’un million de citoyens et sur l’expertise des 400 Ecoles associées et des 200 Chaires UNESCO à travers le monde.
Intitulé « Repenser nos futurs ensemble : Un nouveau contrat social pour l’éducation », ce rapport appelle à réformer les programmes scolaires et les méthodes d’enseignement pour tenir compte des trois grandes évolutions récentes de nos sociétés : celles liées à la mondialisation, le défi climatique et la révolution numérique. Il propose notamment :
- une éducation fondée sur les droits humains et le respect de la diversité culturelle,
- l’intégration de l’éducation à l’environnement dans tous les programmes scolaires,
- des enseignements aux outils numériques qui permettent tant leur maitrise manuelle que d’insuffler chez les élèves l’esprit critique et le recul nécessaire à leur bon usage.
« Le choix qui nous attend est difficile. Soit nous continuons sur une voie insoutenable, soit nous changeons radicalement de cap. Je crois fermement que l’éducation est l’un de nos outils les plus précieux pour construire un avenir durable. Je salue ce rapport de l’UNESCO comme une contribution vitale aux discussions qui doivent avoir lieu à travers les Nations Unies et à travers le monde. C’est une référence fondatrice pour le Transforming Education Summit prévu au second semestre 2022 », a déclaré le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres en saluant l’initiative.