Togo: la justice exige 9 millions de dollars pour libérer Le Floch-Prigent

La justice togolaise exige une caution de neuf millions de dollars pour la libération de Loïk Le Floch-Prigent, détenu à Lomé dans une affaire d’escroquerie, selon son avocat français qui assimile cette demande à une « rançon ».

L’ex-PDG d’Elf a été arrêté le 14 septembre à Abidjan puis transféré à Lomé, où il a été inculpé pour complicité d’escroquerie.

Ses avocats ont plusieurs fois demandé sa remise en liberté, mettant en avant la détérioration de son état de santé qui commande selon eux son rapatriement d’urgence.

Cette analyse a été étayée par une expertise judiciaire togolaise notifiée vendredi dernier qui confirme que M. Le Floch-Prigent doit être soigné sans délai, a indiqué jeudi à l’AFP Me Patrick Klugman.

Or selon l’avocat, le juge d’instruction togolais en charge du dossier a rendu jeudi une ordonnance fixant la remise en liberté de M. Le Floch-Prigent au versement préalable d’une caution de neuf millions de dollars.

« Il s’agit d’une décision qui, sous les apparences d’une mise en liberté, équivaut à une mise à mort par la fixation d’une caution qui s’apparente davantage à une rançon », a estimé Me Klugman, jugeant le montant de la caution « totalement extravagant ».

« Il est acquis au débat que l’infraction alléguée n’a jamais causé un préjudice d’une telle importance et que M. Le Floch-Prigent n’a jamais bénéficié du moindre euro de cette pseudo escroquerie », a-t-il poursuivi, ajoutant que son client n’avait « pas de patrimoine ».

La justice togolaise soupçonne l’ancien patron d’Elf d’être impliqué dans une affaire d’escroquerie internationale qui porterait sur plusieurs millions de dollars.

Exigence humanitaire

Un homme d’affaires émirati, Abbas El Youssef a porté plainte contre un homme d’affaires togolais, Bertin Sow Agba, l’accusant d’avoir organisé un réseau pour lui soutirer plusieurs millions de dollars, ses membres lui faisant croire qu’ils détenaient la fortune du défunt président ivoirien Robert Gueï, estimée à 275 millions de dollars et bloquée sur un compte en banque au Togo.

Abbas El Youssef estime que M. Le Floch-Prigent « serait le chef d’orchestre dans cette affaire d’escroquerie », selon une source judiciaire togolaise.

Détenu à la gendarmerie de Lomé, ce dernier a de nouveau été entendu deux fois la semaine dernière, pendant 15 heures, selon Me Klugman, qui assistait à cette audition.

L’avocat a annoncé son intention de demander à la chambre d’accusation de Lomé d’infirmer l’ordonnance du juge « afin d’éviter un scandale sanitaire ».

M. Le Floch-Prigent souffre en particulier de psoriasis et devait subir fin septembre une intervention chirurgicale en France. Selon son avocat, l’expertise judiciaire a confirmé la dégradation de son état de santé et la nécessité de traiter M. Le Floch-Prigent, « au risque d’une évolution cancéreuse métastatique ».

« Son rapatriement est pour nous une question d’heures et une exigence humanitaire », a estimé l’avocat. « On ne peut mettre en balance la santé et la justice car la santé d’une personne mise en cause est la condition pour que la justice soit rendue. »

Début octobre, le Quai d’Orsay avait également demandé au Togo d’envisager l’évacuation sanitaire de son ressortissant.

M. Le Floch-Prigent avait été condamné en 2003 à 5 ans de prison dans l’affaire Elf et a passé environ deux ans derrière les barreaux pour des malversations financières.

Thierry Barbaut

 

Thierry BARBAUT
Thierry Barbaut - Directeur des financements solidaires chez 42 www.42.fr - Spécialiste en nouvelles technologies et numérique. Montage de programmes et de projets à impact ou les technologies et l'innovation agissent en levier : santé, éducation, agriculture, énergie, eau, entrepreneuriat, villes durables et protection de l'environnement.