Madagascar : Les pertes agricoles font craindre une crise alimentaire

Dans le sud de Madagascar, les effets de la grave sécheresse provoquée par le phénomène El Niño sur la production agricole, où près de 850 000 personnes sont en situation de grave insécurité alimentaire, vont vraisemblablement se poursuivre jusqu’en 2017. Pour y faire face, il est essentiel d’intensifier les interventions humanitaires.

Cette année, l’absence de pluies abondantes dans la région d’Androy, dans le sud du pays, a fait chuter la production de maïs de 80 pour cent par rapport aux niveaux enregistrés en 2015, qui affichaient déjà une régression.

La sécheresse prolongée a également fortement affecté la production d’une autre denrée de base, le manioc, dans la région d’Androy et dans celle d’ Atsimo-Andrefana, toujours située dans le sud du pays, où la production de manioc a diminué de près de moitié . Ces dernières années, les populations vivant dans ces zones ont connu plusieurs sécheresses consécutives et, de ce fait, les souffrances liées à la faim devraient s’accentuer jusqu’en 2017.

Parallèlement, selon un rapport conjoint du PAM et de la FAO publié aujourd’hui et basé sur des données collectées en juillet et août 2016, les conditions climatiques arides des régions d’Atsimo-Andrefana, de Boeny, Melaky, Betsiboka et d’Ihorombe ont eu un impact négatif sur la production de riz, entraînant notamment des baisses de production de l’ordre de 25 à 60 pour cent enregistrées dans ces régions.

1,4 million de personnes en situation d’insécurité alimentaire

Des chiffres mis à jour récemment montrent toute l’étendue du coup porté à la production agricole à travers cette sécheresse qui a eu pour effet de sérieusement compromettre la sécurité alimentaire des hommes. Selon certaines estimations, environ 1,4 million de personnes sont en situation d’insécurité alimentaire dans les trois régions du sud de Madagascar – Androy, Anosy et Atsimo-Andrefana – en 2016/17. Selon la dernière analyse réalisée par le Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire pour Madagascar, près de 850 000 d’entre eux sont en situation de grave insécurité alimentaire. Cela signifie qu’ils ne seront pas en mesure de satisfaire leurs besoins alimentaires et devront compter sur une aide humanitaire d’urgence.

De manière générale, la hausse des prix continue de peser sur le pouvoir d’achat des populations et aggrave la sécurité alimentaire des plus vulnérables. Par conséquent, les ménages réduisent leur consommation de produits locaux et adoptent plutôt des stratégies de survie telles que la consommation de semences et la vente d’animaux et d’outils agricoles. Ils tendent également à consommer de plus en plus de plantes sauvages, souvent inadéquates du point de vue nutritionnel, telles que les fruits du cactus rouge. Globalement, ce genre de situations signifie que de plus en plus de personnes se retrouvent en situation de grave insécurité alimentaire par rapport à l’année précédente.

L’intervention immédiate de la FAO pour le secteur agricole cible 850 000 personnes (170 000 ménages composés de petits exploitants agricoles)

L’impact de la sécheresse sur la production agricole nationale

La sécheresse dans les régions situées au sud de Madagascar a contribué à réduire la production nationale de maïs et de manioc. La production nationale de maïs pour 2016 devrait atteindre les 316 000 tonnes, soit en baisse de 4 pour cent par rapport à la récolte de 2015 et de 19 pour cent par rapport à la moyenne générale. La production de manioc devrait atteindre les 2,6 millions de tonnes, ce qui équivaut à une baisse de 16 pour cent par rapport à la moyenne des cinq dernières années.

La production nationale de riz (paddy) a profité des pluies abondantes dans les régions du centre, du nord et de l’ouest du pays – les principales régions productrices de riz de l’île – et devrait atteindre les 3,8 millions de tonnes en 2016, soit une hausse de 2,5 pour cent par rapport à l’année précédente, mais toujours en baisse de 5 pour cent par rapport à la moyenne de ces cinq dernières années.

La réponse de la FAO 

Le PAM et la FAO travaillent ensemble afin de cibler et d’apporter une aide aux ménages en situation de grave insécurité alimentaire et de renforcer leurs moyens d’existence, mais aussi de s’assurer que les ménages les plus vulnérables, ceux à la charge des femmes, des personnes âgées ou encore des personnes ne possédant pas de terres, ne soient pas désavantagés. Il est essentiel que l’aide visant a renforcer les moyens d’existence soit apportée immédiatement afin de profiter au mieux de la prochaine campagne de semis prévue pour le mois de novembre.

L’intervention immédiate de la FAO pour le secteur agricole cible 850 000 personnes (170 000 ménages composés de petits exploitants agricoles) dans les départements les plus affectés. Il s’agit de fournir des semences à maturation rapide et résistantes à la sécheresse, ainsi que des légumes-racines (manioc et patates douces).

Les agriculteurs recevront également des outils pour remplacer ceux qui ont été vendus lors de l’actuelle «saison de la faim», qui s’est prolongée. La production animale bénéficiera également d’un coup de pouce grâce à des rations alimentaires supplémentaires pour le bétail et la mise en œuvre d’activités liées à la santé animale.

A ce jour, seuls 3,8 millions des 22 millions de dollars nécessaires pour la mise en œuvre des interventions d’urgence de la FAO ont été sécurisés.

L’Organisation a besoin de toute urgence de ce financement afin de s’assurer que les agriculteurs ne rateront pas la prochaine campagne de semis. Le secteur agricole local doit être rétabli afin d’éviter de dépendre de l’aide alimentaire à long terme.

Christian Arshavin
Christian Arshavin, diplômé dans le graphisme à l'Institut Technique Salama, habite à Lubumbashi en RDC. Etudiant à Maria Malkia, une université de sciences informatiques avec une spécialisation en "Technologie et Réseaux".