Ile Maurice: Les petites entreprises aident à combattre la pauvreté

PORT-LOUIS,

Raja Venkat, un vendeur de nourriture sur le trottoir de la Place de l’immigration dans le centre de Port-Louis, la capitale de l’île Maurice, est assis sur son tricycle avec un sac rempli de ‘dhal puris’ – un petit pain indien rond et plat bourré de légumes secs – qu’il vend avec la sauce tomate et du curry de haricots.

« Venez goûter mes ‘dhal puris’, vous en voudrez plus. Venez, venez », crie-t-il.

Des milliers de petites entreprises comme celle-ci ont vu le jour dans chaque ville et village de l’île depuis que le gouvernement a assoupli les procédures pour l’obtention d’un permis de faire des affaires il y a un an. « Parfois, j’aidais dans la maçonnerie, dans le transport de légumes ou le lavage des véhicules. J’étais disponible pour n’importe quel travail, mais la plupart du temps, j’étais au chômage », déclare Venkat à Info Afrique.
Le taux de chômage était de 8,6 pour cent à la fin de 2012, selon les chiffres obtenus auprès du Service des statistiques de l’île Maurice, l’organisation officielle chargée de la collecte, la compilation, l’analyse et de la diffusion des données statistiques. Et l’assouplissement des procédures d’obtention d’un permis de faire des affaires visait à réduire le chômage dans cette île de l’océan Indien.

Les chiffres officiels du Service des statistiques indiquent que le nombre total d’activités commerciales est passé de 133.723 à 138.236 en 2012.

Depuis qu’il a commencé sa petite affaire, il y a six mois, après avoir payé les frais exigés (environ 50 dollars par an à la municipalité de Port-Louis) pour la licence de son entreprise, Venkat a maintenant un revenu régulier. Sa femme, Aashna Venkat, cuit les ‘dhal puris’ dans la petite cuisine en bois de leur maison à Terre-Rouge, localité située à quatre kilomètres.

« Je gagne maintenant assez pour nourrir la famille et aussi pour économiser un peu d’argent pour l’avenir », indique ce père de deux enfants, âgés de six et trois ans.

vendeur-dhal-purisBeaucoup d’autres personnes ont commencé des entreprises similaires sur l’île, vendant des aliments, des légumes, des fruits, de petits articles de luxe et des vêtements. Certains ont ouvert de petits ateliers mécaniques où ils réparent les vélos et les motos. Beaucoup de femmes, issues en particulier de familles musulmanes, ont développé l’art d’appliquer le henné aux mains.

Le ministre des Petites et Moyennes Entreprises et des Coopératives, Jim Seetaram, indique à Info Afrique qu’il y a plus de travailleurs dans ces petites et moyennes entreprises que dans les établissements plus grands.

« La création nette d’emplois dans les petites et moyennes entreprises entre 2000 et 2011 est estimée à 67.800, soit une augmentation de plus de 36 pour cent, comparativement à un accroissement de 14.400 dans les grands établissements », explique-t-il.

« Les petites et moyennes entreprises sont les principaux moteurs de création d’emploi et contribuent de manière significative à la croissance économique. Elles emploient autour de 250.000 personnes, représentant plus de 44 pour cent du nombre total d’emplois ».

Le président et conseiller en affaires de la Chambre de commerce et d’industrie de l’île Maurice, Ganesh Ramalingum, déclare à Info Afrique que ces micro-entreprises sont très importantes pour l’économie parce qu’elles créent des emplois.

« Une personne qui a des compétences en mécanique ouvre une entreprise de réparation de vélos et de motos. Elle aura besoin d’une ou deux personnes pour l’aider … Ainsi, beaucoup d’emplois se créent de cette façon et c’est bon pour l’économie. Les gens qui, auparavant, avaient de difficulté à gagner leur vie, créent maintenant leurs propres entreprises dans des domaines qui leur conviennent », souligne-t-il.

Les autorités locales réglementent ces petites entreprises. Elles ne sont pas censées s’impliquer dans une quelconque activité inhabituelle dans une zone résidentielle, ou déranger les voisins à des heures indues ou polluer l’environnement avec la poussière, des fumées ou des odeurs. Elles sont tenues de se conformer aux lignes directrices émises par le Service des incendies, l’Autorité sanitaire et le ministère de l’Environnement.

Mais beaucoup estiment que ces petites entreprises ne se conforment pas aux lignes directrices.

Ganeshen Mooneesawmy, vice-président du Conseil provincial de la Rivière du Rempart qui délivre et contrôle les permis de faire des affaires dans la partie nord de l’île, est content que ces personnes travaillent, mais constate que beaucoup d’entre elles manquent de discipline dans la gestion de leur entreprise.

« Elles ne demanderont pas des emplois auprès du gouvernement puisqu’il n’en (existe) pas de disponibles… (mais) elles vendent des aliments de manière non hygiénique et elles perturbent le milieu de vie dans leur zone. Nous disposons d’un personnel très insuffisant pour garder un contrôle sur elles », explique-t-il à Info Afrique.

A Goodlands, dans le nord de l’île Maurice, les petites entreprises opèrent littéralement sur les trottoirs, en dépit d’une loi qui interdit cela. Beaucoup d’entre elles mettent leurs marchandises dans de grands paniers qu’elles déposent sur des étals en bois ou en fer sur les trottoirs.

Ashok (le nom complet n’est pas donné), un vendeur, déclare à Info Afrique qu’il est obligé de faire cela pour attirer les clients parce que son entreprise est très petite.

« Il y a une grande concurrence autour des grands étals et aussi de la part des entreprises plus petites ici. Si vous ne vous battez pas, vous ne mangerez pas ce soir », dit-il.

Nasseem Ackbarally

Thierry BARBAUT
Thierry Barbaut - Directeur Afrique et pays émergents chez 42 www.42.fr et consultant international - Spécialiste en nouvelles technologies et numérique. Montage de programmes et de projets à impact ou les technologies et l'innovation agissent en levier : santé, éducation, agriculture, énergie, eau, entrepreneuriat, villes durables et protection de l'environnement.