Développement d’écosystèmes agricoles au Burkina

Femme burkinabé travaillant la séparation du grain et de la poussière avec le vent - Thierry Barbaut 2017
Femme burkinabé travaillant la séparation du grain et de la poussière avec le vent - Thierry Barbaut 2017 - www.barbaut.net
  • Au Burkina Faso, l’agriculture emploie 80 % de la population active. Pourtant, chaque année, de nombreux cultivateurs perdent beaucoup d’argent à cause du manque d’infrastructures de stockage et de conservation qui les obligent souvent à brader leurs récoltes.
  • Un projet en faveur de l’agriculture et de l’élevage, financé par la Banque mondiale a tenté de remédier à ce problème en finançant la construction de meilleures infrastructures.
  • Jean-Baptiste Ouedraogo, cultivateur d’oignons à Noungou, a ainsi pu obtenir un prêt pour construire un entrepôt d’une capacité de 12 tonnes.

Noungou, village de la commune rurale de Loumbila, se trouve à une heure de route de la capitale Ouagadougou. Ici, certains habitants comme Jean-Baptiste Ouedraogo se consacrent à la culture de l’oignon depuis 1985. Cet agriculteur, qui est parti de rien, est aujourd’hui un modèle pour sa communauté, grâce aux subventions reçues du Programme d’appui aux filières agro-sylvo-pastorales (PAFASP), financé par le Groupe de la Banque mondiale au Burkina Faso.

« Avant, nous produisions beaucoup d’oignons mais on ne savait pas comment et où les conserver, on était donc obligé de les vendre tout de suite après l’arrachage et parfois de les brader », explique-t-il. Des infrastructures de stockage adaptées permettent en effet de conserver plus longtemps les récoltes, de limiter ainsi le gâchis et de gagner plus d’argent en fonction des fluctuations du marché.  « Juste après la récolte de mars 2016, le sac de 50 kg ne dépassait pas 4000 francs CFA alors que la même quantité peut être vendue 22 500 francs CFA au mois d’octobre. »

Pour Jean-Baptiste, la belle aventure du PAFASP a commencé en janvier 2008. Le projet lui a accordé une subvention de 3,15 millions de francs CFA pour construire un « rudu » d’une capacité de 12 tonnes. Jean-Baptiste a pour sa part contribué à hauteur de 350 000 francs CFA. Construit à faible coût en utilisant des matériaux locaux, le rudu est inspiré des greniers traditionnels. Ce nouveau type d’entrepôt permet de mieux faire circuler l’air et de réduire l’humidité. Il peut conserver efficacement près de trois tonnes d’oignon pendant six mois, permettant ainsi aux petits exploitants de se prémunir contre la baisse des prix à la récolte.

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Jean-Baptiste, qui était auparavant obligé de jeter une bonne partie de sa récolte d’oignons, faute de moyens de stockage et de conservation adaptés, est désormais à la tête d’une entreprise prospère grâce à ses nouveaux entrepôts.

 « Avant, nous produisions beaucoup d’oignons mais on ne savait pas comment et où les conserver, on était donc obligé de les vendre tout de suite après l’arrachage et parfois de les brader. »

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Le Rudu est un nouveau type d’entrepôt permettant de mieux faire circuler l’air et de réduire l’humidité, afin de conserver les récoltes en toute saison.

Huit ans plus tard, l’agriculteur est devenu un chef d’entreprise à la tête d’une exploitation très prospère dont le chiffre d’affaires avoisine les 15 millions par an avec une marge bénéficiaire pouvant aller jusqu’à 12 millions. C’est avec beaucoup de nostalgie qu’il montre sa maison en banco qu’il a tenu à conserver alors qu’une autre en parpaing vient d’être achevée.

Femme burkinabé travaillant la séparation du grain et de la poussière avec le vent - Thierry Barbaut 2017
Femme burkinabé travaillant la séparation du grain et de la poussière avec le vent – Thierry Barbaut 2017

Avec son agrément d’entrepreneur agricole en poche, Jean-Baptiste s’est même acheté une voiture et ses enfants suivent désormais leur scolarité sans interruption. Son entreprise a de beaux jours devant elle puisque son agrément lui permettra d’acheter des engrais hors taxe et d’avoir des semences de qualité pour améliorer sa production.

Pas étonnant donc, qu’il soit en train de construire un autre entrepôt d’une capacité de 30 tonnes. Jean-Baptiste emploie actuellement cinq  personnes et est membre de l’association Teel Taaba, qui signifie « soutenons- nous », en Morée (langue la plus parlée au Burkina Faso), qui bénéficie également de subventions du PAFASP. Six autres membres de l’association ont également bénéficié de subvention pour construire des « rudu ».

Désormais à la tête d’une exploitation de taille, Jean-Baptiste s’est transformé en entrepreneur et  va très bientôt déclarer ses employés à la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS). Cet homme jovial et débonnaire encourage les jeunes, qui ont tendance à préférer la fonction publique, à se lancer dans l’agriculture car pour lui « la terre ne ment pas ».  « Un jeune, avec de la volonté, peut se passer de la fonction publique et vivre décemment de l’agriculture », s’exclame-t-il !

Une expérience aux effets multiplicateurs

Jean-Baptiste est aussi devenu un formateur endogène et son entrepôt sert de cadre d’apprentissage pour d’autres producteurs. Par ailleurs, près de 40 unités de conservation d’oignons ont été construites à travers la région du Plateau Central à partir de cette  unité pilote.

Le PAFASP a également soutenu l’association Teel taaba en fournissant des équipements, tels que de l’engrais et des motopompes) à une cinquantaine d’agriculteurs membres.

Le Projet a également soutenu trois autres filières (mangue, bétail-viande et volaille locale).

Le PAFASP en bref 

Le PAFASP a été  lancé en  2007. Il est mis en œuvre par le ministère de l’Agriculture, avec l’appui technique de la Banque mondiale. Son coût total est évalué à 44 384 milliards de francs CFA financé à 86% par la Banque mondiale.

Le PAFASP vise à accroître la compétitivité des chaînes de valeur ciblées sur le marché local, régional et international, afin de favoriser une croissance plus inclusive dans le secteur agricole.

Le programme s’articule principalement dans 4 chaînes de valeur – mangues, oignons, viande de bœuf et volaille locale – ainsi que dans le secteur cotonnier et les cultures de diversification (maïs, niébé et sésame).

8 ans après sa mise en œuvre, la Banque mondiale a accordé un financement supplémentaire de 24,5 milliards de francs CFA au gouvernement afin de poursuivre la mise en œuvre de ce programme et de consolider les bons résultats obtenus,  sur la période juillet 2014 à juin 2016.

Christian Arshavin
Christian Arshavin, diplômé dans le graphisme à l'Institut Technique Salama, habite à Lubumbashi en RDC. Etudiant à Maria Malkia, une université de sciences informatiques avec une spécialisation en "Technologie et Réseaux".