Face à l’expansion de Boko Haram : l’urgence de rompre avec l’indifférence

Carine du collectif #SoyausAussiNigerians
Carine du collectif #SoyausAussiNigerians

Il ne se passe plus une semaine sans que ne nous parviennent les échos des sordides agissements du groupe terroriste Boko Haram qui, du Nigeria, sévit maintenant au Cameroun et au Tchad.

Cette dynamique expansionniste du terrorisme dans cette région du monde contraste avec l’absence d’une action vigoureuse de la communauté internationale, -entendez ici les pays de la région et leurs alliés d’ailleurs-. Non seulement cette indifférence interpelle mais elle révolte, à au moins deux titres.

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Premièrement, notre indifférence face aux sévices du groupe terroriste Boko Haram contre les populations civiles nigérianes est moralement inacceptable.

Il est simplement inconcevable qu’au 21 ème siècle, en 2015, l’on assiste impassible, presque contemplatif, à la répétition de massacres à grande échelle, juridiquement qualifiables de génocides au regard du caractère systématique et planifié de ces crimes.

Comme si nous avons été atteints d’une telle amnésie, au point d’oublier les drames qu’a connus l’humanité, du fait de la passivité et de l’inaction de ceux qui avaient le pouvoir d’arrêter l’ascension du crime. Comme si les souvenirs des génocides Nazi, Rwandais, des massacres de Sebrenica -et nous pouvons encore rallonger la liste- ne devaient pas suffire à éveiller la conscience morale et politique de ceux que le Pasteur Martin Luther King appelait « les bons ».

L’enfer pour les population face aux massacres de Boko Haram

 

La léthargie comme posture face à la tragédie humaine qui a cours entre le Nigeria, le Cameroun et le Tchad n’est pas à la hauteur des promesses proclamées dans les textes fondateurs de nos démocraties modernes.

Au contraire, le manque affligeant de volontarisme auquel nous assistons pour freiner Boko Haram suggère que les principes à vocation universelle d’égalité des Hommes (article 1 de la DDHC de 1789 ; préambule de la constitution américaine de 1776), de droit à la vie et à la sûreté (Article 3 de la déclaration universelle des droits de l’Homme) ou encore de droit à la sécurité et à l’intégrité (article 4, 5, 6 de la charte africaine des droits de l’Homme et des peuples) n’auraient qu’une valeur toute relative.

La dignité de la personne humaine ne saurait être à double vitesse, avec comme ultime baromètre, les intérêts géostratégiques des Nations, notamment les plus puissantes : soit elle est reconnue et donc défendue avec tous les moyens que le droit autorise, soit elle est purement et simplement niée. Et il n’y a alors rien de mieux que l’indifférence pour le signifier.

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De surcroît, « la non-coopération avec le mal est un devoir tout autant que la coopération avec le bien » (Ghandi). Chaque jour d’inertie, ce sont des hommes, des femmes, des enfants, des êtres humains qui sont condamnés à être arrachés à l’existence de façon atroce. Les massacres de Baga du 3 janvier dernier en témoignent avec une glaçante répulsion. Nous ne devons plus et nous ne pouvons plus laisser ce genre de choses se produire dans un monde civilisé. Il est alors impérieux de freiner au plus vite cette machine à broyer les vies appelée Boko Haram.

En second lieu, la passivité du monde face à la situation au Nigeria est une position politiquement intenable.

Si le groupe terroriste Boko Haram n’est pas incessamment stoppé, nous assisterons très vite à la naissance d’un nouvel auto-proclamé « État islamique » qui étendra son empire du chaos dans toute la sous-région ouest africaine voire au-delà. L’histoire de la naissance de l’auto-proclamé « État islamique » qui sévit aujourd’hui au Moyen-orient, né de l’inaction du monde face à la situation en Syrie, devrait nous interpeller.

Il y a six mois, le Cameroun voisin n’était pas touché par le fléau Boko Haram. Il y a encore à peine deux mois, le Tchad, au nord-est du Nigeria, n’était pas visé par les attaques des sbires d’Abubakar Shekau. Mais aujourd’hui, lorsque l’on évoque les agissements criminels du groupe terroriste Boko Haram, l’on ne mentionne plus seulement le Nigeria mais également le Cameroun et le Tchad. A-qui-le-tour, est-on porté à se demander ? L’inertie actuelle amènera immanquablement à une expansion de ce groupe vers d’autres pays limitrophes comme le Niger, le Bénin, le Togo, la Côte d’ivoire, le Mali, le Burkina Faso, le Ghana, etc.

Carine du collectif #SoyausAussiNigerians
Carine du collectif #SoyausAussiNigerians

 

Par ailleurs, il est fort à craindre que cette ambition affichée d’expansion territoriale amène à un renforcement des liens avec d’autres groupuscules terroristes de la région (AQMI, ANSARU, LE MUJAO, etc.), en vue de constituer une armée de la terreur plus structurée, plus institutionnalisée, pour réaliser leur projet de « califat ».

« Plus que l’oppression de ces terroristes, l’indifférence de la communauté internationale est encore plus effrayante » indique Djogan Adébissi.

 

jesuisnigerianLa faible implication des premiers acteurs concernés, les pays de la région, incapables de s’unir sur les moyens de freiner le terrorisme, associée à l’intérêt très relatif de leurs alliés occidentaux signe en outre, la victoire symbolique de Boko Haram.

A coup d’exhibition de stocks d’armes, le leader de ce groupe, dans une nouvelle vidéo en date du 20 janvier pouvait se targuer en ces termes, de l’irrésistible invincibilité du terrorisme : « nous n’arrêterons pas. Ce n’est pas grand chose. Vous verrez ». Plus que l’oppression de ces terroristes, l’indifférence de la communauté internationale est encore plus effrayante.

Le combat contre le nihilisme total, la négation de la vie, le rejet de liberté, le refus de l’altérité, le démantèlement de l’État, la politique du fanatisme, la religion de la violence, le projet de totalitarisme culturel, intellectuel, au cœur de la démence meurtrière de Boko Haram, ne peut souffrir ni de l’indolence, ni de la peur, ni de cyniques considérations géostratégiques, encore moins de ridicules postures.

Le temps est à l’action, à l’action vigoureuse. Le terrorisme n’est pas invincible ; le terrorisme ne peut pas être invincible.

Le royaume de la terreur ne peut s’emparer de davantage de territoires. Au nom de la démocratie, de la liberté et de la dignité humaine, il est plus que urgent d’agir pour freiner Boko Haram. Avant qu’il ne soit trop tard…
Adébissi Djogan,
Coordinateur de la campagne #SoyonsAussiNigerians
Président de l’association Initiative For Africa (IFA)

Adébissi Djogan - Président d’Initiative For Africa
Désigné en 2015 par le Cabinet Africa Diligence parmi les 69 jeunes leaders africains émergents, Adébissi Djogan a fondé Initiative For Africa depuis maintenant deux ans, porté par une idée à la fois simple et ambitieuse : mobiliser les talents, compétences et énergies pour activer le potentiel du continent africain à travers différents programmes en matière d'entrepreneuriat et de leadership. Initiative For Africa est présent en France et dispose de Hubs dans plusieurs capitales africaines.